Depuis le 15 octobre, le journal en ligne Rapports de force a été totalement évincé de Facebook: tous les liens vers leur site sur tous les comptes utilisateurs ont été supprimés, plus personne ne pouvait poster de lien menant vers ce site:
Bien entendu, aucune explication n’a été donnée, mais il semblerait que ce soit suite à la publication de cet article, à propos de « la mobilisation nationale contre la répression subie par quatre enseignant.e.s d’un lycée, à Melle dans les Deux-Sèvres».
Le 2 novembre, le journaliste annonçait lancer une procédure judiciaire contre Facebook. Le lendemain, il était de nouveau possible de poster des liens vers ce site.
Rapport de force possède son propre système de publication, mais la grande majorité de ses lecteurs, et donc des dons qui font actuellement vivoter le journaliste, venaient des partages sur Facebook. Cet acte de censure le mettait donc en grand danger.
On ne peut pas s’étonner d’un tel acte de modération ni dire que «c’est dégueulasse» et réclamer des droits et des garanties sur les publications Facebook: ce réseau «social» est une entreprise privée qui dicte ses propres règles. Ce qu’on peut retenir de ce nouvel exemple, c’est que non, on ne peut pas «utiliser Facebook à bon escient», non, on ne peut pas l’utiliser de manière «neutre» vu qu’il n’est pas neutre en soi, non, on ne peut pas s’informer correctement sur Facebook et oui, l’utiliser a un impact direct: sur soi, sur ce que l’on peut y lire, sur sa perception du monde, sur ses propres idées. Est-ce que vous voulez vraiment laisser une influence sur votre cerveau à cette entreprise ?
Et non, ce n’est pas du tout la première fois que ce genre de chose arrive. Le NouvelObs titre que depuis 2017, Facebook a intentionnellement diminué la visibilité des médias de gauche: https://www.nouvelobs.com/elections-americaines-2020/20201018.OBS34892/facebook-a-reduit-la-visibilite-des-medias-de-gauche-tout-en-restant-critique-des-deux-bords.html
«Facebook a modifié en 2017 l’algorithme de son fil d’actualité pour réduire la visibilité des sites américains d’informations de gauche, rapporte le « Wall Street Journal ». Son PDG Mark Zuckerberg a lui-même approuvé ces modifications. Parmi les sites affectés, Mother Jones, dont le directeur éditorial Ben Dreyfuss indique que les dirigeants de Facebook lui ont assuré plusieurs fois, en 2017 et 2018, que le trafic pourrait diminuer, mais pas de façon à favoriser ou défavoriser un groupe donné d’éditeurs.
En 2019, Mother Jones a constaté la forte baisse de son audience sur le réseau social, soit une perte d’environ 600.000 dollars en 18 mois, indique le journal en ligne The Verge. Les dirigeants de ce média à but non lucratif créé en 1976 ont d’abord pensé que leur site était une victime collatérale d’une politique ne les visant pas particulièrement, mais ils ont constaté que leur situation ne cessait d’empirer, comme l’a tweeté sa PDG Monika Bauerlein.»
Mediapart fait état des mêmes observations en 2019 pour des groupes de «gauche radicale»: https://www.mediapart.fr/journal/france/290819/facebook-aneantit-l-audience-d-une-partie-de-la-gauche-radicale?onglet=full
Ils s’appellent Lille insurgée, Bretagne noire, Collectif Auto Média énervé, Cerveaux non disponibles, Groupe Lyon Antifa… Plusieurs collectifs qui administrent des pages Facebook font état depuis quelques jours de la chute libre du nombre de vues sur leurs publications, alors qu’elles touchaient jusque-là des milliers de lecteurs, souvent des dizaines de milliers, parfois des centaines.
Vous-même pouvez être censuré·e pour de drôles de raisons. Un témoignage de lectrice:
Je viens de quitter mon compte perso Facebook suite à 2 blocages: 1 sur un article sur la démocratie participative et le 2ème à cause d’une blague sur le covid !!!
Publier sur Facebook peut s’avérer dangereux: https://www.nextinpact.com/news/108067-des-posts-sur-facebook-peuvent-justifier-non-renouvellement-dun-titre-sejour.htm
Et l’on sait que ce qu’on y lit est clivant, et a tendance a être fascisant: https://www.liberation.fr/futurs/2017/03/12/facebook-un-mois-dans-la-machine-a-infos_1555220
Quelles alternatives ?
Lisez les sites internet directement, utilisez un lecteur de flux RSS, lisez les agrégateurs de nouvelles (type portail.bastamag.net), achetez de (bons) journaux en kiosk, furetez en librairie (indépendante), arrêtez Facebook, prenez le temps, essayez-vous à Mastodon ou à Diaspora (mais c’est pas obligé)… et ne vous ruez pas sur Twitter, Whatsapp ou autres « alternatives » qui n’en sont pas !